La Turquie à vélo d'Edirne à Taskesti, c’était…

… une fouille intégrale de mes sacoches à la frontière (par des douaniers très corrects et souriants) alors qu’il y a 2 ans j’étais rentré en Turquie à vélo sans être contrôlé

… une file de camions longue de 7 km après la frontière, qui témoigne de l’intensité des échanges économiques entre la Turquie et l’Union Européenne

… Tamer, mon hôte Warmshowers à Edirne, propriétaire du magasin de vélos en bas de chez lui, qui a accueilli plus de 200 cyclotouristes ces 3 dernières années (!) mais qui en accueille beaucoup moins depuis quelques mois à cause des attentats et de la récente tentative de coup d’Etat

… une journée de pause à me promener dans Edirne avec Elif, enseignante de français, et Quentin, membre de l’équipe du magasin de vélo de Tamer, qui a interrompu (provisoirement ?) son tour du monde à vélo il y a 9 mois pour s’installer à Edirne

… voir des drapeaux turcs partout, partout, partout (aux fenêtres, sur les voitures, sur la devanture de tous les commerces…) jusqu’à l’overdose

… boire une bière en terrasse et discuter de la situation politique instable de la Turquie avec Cenk, informaticien à l’université, déjà rencontré il y a 2 ans lors de mon trip Paris-Istanbul à vélo

… un niveau de vie plus élevé qu’en Roumanie et en Bulgarie, comparable à celui de la France ou de l’Allemagne dans les grandes villes

… des paysages très monotones d’Edirne à Silivri sur une 2x2 voies de très bonne qualité qui comporte une large bande d’arrêt d’urgence

... un nombre incalculable de thés, de fruits et de légumes offerts sur le bord des routes, aux terrasses des cafés ou dans les stations essence (très pratiques au passage car toutes équipées de bornes Wifi)

… Orkan, installé depuis plus de 20 ans en Allemagne et de retour chez ses parents pour 2 semaines de vacances avec femme et enfants, très critique sur l’évolution de son pays natal (« tout pour la religion, rien pour l’éducation »), qui m’a offert à manger et à boire à Havsa

… Ismaïl, rencontré à la terrasse d’un café de Lüleburgaz, avec qui nous n’avions aucune langue en commun mais qui a compris que je cherchais un endroit en ville pour passer la nuit, et qui m’a trouvé une chambre disponible dans un foyer de travailleurs pour l’équivalent de quelques euros (par contre il ne fallait pas être regardant sur l’hygiène absolument déplorable des lieux…)

… Nezim, communiste kurde, et Serdal, fan d’Atatürk (et pourtant bons amis, comme quoi…), rencontrés au foyer de travailleurs et qui passent plusieurs mois à Lüleburgaz sur un chantier de construction d’oléoduc. Ils m’ont établi un classement des villes où il fait bon vivre en Turquie avec pour critères les plus belles filles et la possibilité de boire de l’alcool en terrasse. Verdict : 1. Izmir 2. Edirne 3. Istanbul

… le bas-côté des routes qui ressemble parfois à de véritables décharges à ciel ouvert

… Ilona et Karol, cyclos polonais des environs de Cracovie qui se rendent à Istanbul, avec qui j’ai pédalé une après-midi de Corlu à Silivri avec un bon vent de face

… Beylem, mon hôte Warmshowers à Silivri, commerciale dans l’électroménager, qui a spontanément accepté de loger également Ilona et Karol dans son appartement pour une nuit

… une journée de pause à Silivri à me promener en bord de mer

… une étape avec Lawrence, cyclo anglais, au dernier jour de son périple d’Amsterdam à Istanbul

… une entrée dans l’agglomération d’Istanbul sur une voie express à 2x5 voies (histoire d’éviter les autoroutes à 2x8 voies…) à la circulation chaotique

… Dilber et Nezih, mes hôtes Warmshowers à Istanbul, respectivement manageuse d’un groupe de musique et responsable d’une start-up de quelques personnes dans le numérique, tous deux la gentillesse incarnée, avec qui nous avons eu d’innombrables discussions pendant mes 4 soirées et 3 journées avec eux, et qui projettent de quitter la Turquie dans les 2 ans à venir en raison de l’atmosphère politique qui leur est de plus en plus insupportable

… 3 journées de pause à me promener dans Istanbul, ville magique à cheval entre Europe et Moyen-Orient (au sens géographique et culturel)

… voir que les touristes occidentaux ont complètement délaissé Istanbul, remplacés par les touristes arabes du Golfe pourtant peu appréciés des Turcs, à part pour leur pouvoir d’achat…

… une traversée du Bosphore en bateau, sachant qu’il est formellement interdit de pédaler sur le pont autoroutier (je n’ai pas envie d’avoir de problèmes avec la police apparemment sur les dents en ce moment)

… ma première étape en Asie en compagnie de Nezih qui a tenu à m’accompagner jusqu’à Sile et qui a fait le chemin retour pour Istanbul le lendemain

… une sortie d’Istanbul en douceur par de petites routes relativement peu fréquentées (pour les standards stambouliotes…)

… beaucoup de chiens errants, mais jamais agressifs, dans les forêts à l’est d’Istanbul

… une pause à la plage sur le bord de la mer Noire peu avant Sile sous une chaleur écrasante

… Boray, notre hôte Warmshowers à Sile, professeur d’informatique à l’université et passionné de VTT, qui nous a concocté un délicieux dîner et un petit-déjeuner royal

… une autre pause à la plage le lendemain matin (probablement la dernière fois que je vois la mer avant une éternité)

… la chance de tomber sur un abri en pleine forêt pendant une grosse averse

… Emir, mon hôte Warmshowers à Sakarya, ingénieur dans l’automobile, qui est un passionné de vélo de route au point d’en faire plusieurs fois par semaine après le travail

... pédaler le long d'un camp de réfugiés syriens géré par le Haut Comité aux Réfugiés des Nations Unies près d'Akyazi et me sentir tristement impuissant à la vue de tous ces enfants damnés de la terre qui m'ont salué à mon passage

… une petite route très agréable qui serpentait à travers les montagnes entre Dokucun et Taskesti

... de plus en plus de gens qui me saluent ou klaxonnent depuis leur voiture ou leur camion

… les portraits d’Erdogan qui remplacent progressivement ceux d’Atatürk à mesure que je pédale vers l’est

… un abruti qui a fait tomber mon vélo (j’ose espérer involontairement) alors que je buvais un thé en terrasse à Taskesti et que ça a fait rigoler

… un jeune rencontré à cette même terrasse et parlant bien anglais qui m’a dit que je pouvais dormir dans la mosquée (« c’est l’endroit le plus sûr, au moins tu n’auras pas à craindre les chiens errants »)

… assister à la prière du soir assis dans un coin avant qu’Ali, l’imam (investi d’une grande solennité dans ses habits, mais gros blagueur en dehors de la mosquée), m’invite à boire un thé et tienne absolument à ce que je parle par Whatsapp à l’un de ses cousins installé à Châteauroux